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Me fermer ou m'ouvrir à l'autre

Notre vie est une constante mise en présence, en relation ou confrontation avec l’autre. Mon mari, mon enfant, mon collègue, mais aussi l’étranger, le ou les inconnus, les ennemis... Et devant cet autre ou ces autres que j’aime ou non, qui me rassurent ou qui me font peur, j’ai fondamentalement deux choix : me fermer ou m'ouvrir à l'autre. C'est ce qu'illustre très bien la Roue du Changement de Regard conçue par Isabelle Eliat-Serck...

Me fermer et rester à l’intérieur de moi avec les « miens », afin de contrôler la situation ou de me protéger des « autres ». C’est souvent ce premier choix qui vient à moi spontanément. Un mur intérieur servira à séparer dans mon esprit ceux qui ont raison (côté transparent) de ceux qui ont tort (côté rayé), qui sont trop différents, voire dangereux.

C’est ainsi que fonctionne la logique de toute violence familiale, groupale, sociétale, religieuse, mondiale... Même si elle ne se voit pas encore, la violence, la guerre a déjà commencé lorsque je vis cet enfermement intérieur qui se manifestera tôt ou tard dans mes attitudes, mes choix, mes actes.

Je peux aussi m’enfermer moi-même dans le côté rayé, et m’écraser devant l’autre. Si au contraire, je raye l’autre, il se sentira spontanément poussé à se fermer à son tour et à me rayer dans son esprit : il va préparer ses justifications et ses vengeances... La logique de la violence répond toujours à cette même règle.

M’ouvrir à l’autre, ne plus le voir comme une menace. Je peux cesser de couper le monde en deux et du même coup, cesser de me couper moi-même du monde. La voie alternative de la non-violence opère une ouverture du cœur dans laquelle je sors radicalement de la logique qui supposait d’écraser l’autre ou de m’écraser. Je découvre alors la paix et la sécurité intérieures et fondamentales que me procure ce nouveau regard.

Pour opérer cette transformation, il me faut déjà commencer par accepter que je ne suis pas moi-même 100% bon, bien, juste et gentil… et que je n’ai pas à prendre toute la place. Un difficile travail de décorticage, d’ajustement et d’engagement est nécessaire, qui suppose de travailler à changer ma vision intérieure de la situation et aussi de changer de cible : mon véritable ennemi est l’injustice et le mal, et non la personne qui le commet. Il ne s’agit pas d’endormir mon indignation ou ma force d’agressivité, ni de chercher à avoir la paix, mais activement faire la paix. Sortir de la logique de la réaction pour entamer une véritable action...

 

Ce chemin devient fécondité

Le chemin non-violent dépasse la logique de la simple efficacité (il est bien plus que la mise en œuvre de techniques ou une stratégie action-résultat) mais devient fécondité, car il engendre toujours du nouveau, de l’inédit, de l’imprédictible et met en jeu des forces qui nous dépassent. La non-violence est un passionnant travail de création, où la force de Vie et de libération l’emporte sur la spirale de destruction. Il n’est donc pas étonnant qu’elle porte divers noms tels : « non-violence active » ( J. et H. Goss-Mayr), « maîtrise douce » (A. Wénin), « amour des ennemis » (Jésus de Nazareth), « force de la vérité » (Gandhi), « fermeté permanente » (Brésil)…